Voilà une innovation suisse qui pourrait révolutionner le monde du voyage. Le projet Destinus consiste à faire voler un appareil hypersonique fonctionnant à l’hydrogène. Ce « super Concorde », volera à 30 km d’altitude et aura une vitesse de croisière de 6 000km/h… soit à plus de deux fois la vitesse du Concorde! Au-delà du défi technologique, Destinus veut démontrer le rôle primordial de l’hydrogène dans la décarbonation de l’aviation.
Un projet complètement farfelu ? Oui, à première vue. Faire voler des avions sans pilote pour rejoindre l’Asie en trois petites heures à une vitesse hypersonique, ça paraît complètement futuriste. Et pourtant, la société Destinus, basée à Payerne, a déjà fait voler deux prototypes et a présenté son troisième au salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget.
We will rock you @salondubourget!
— Destinus (@destinusaero) June 19, 2023
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Le premier vol officiel devrait avoir lieu en 2024. Destinus table sur la commercialisation de son appareil de 25 sièges en 2030-2035.
Derrière ce projet digne d’un film de science-fiction se trouve la startup suisse Destinus SA, fondée en 2021 par le physicien russe Mikhail Kokorich, bien connu dans le monde de l'aéronautique. La jeune pousse n’a cessé de grandir en deux ans pour compter aujourd’hui 140 employés. Elle a déjà levé 50 millions d’euros et compte dans son comité stratégique de nombreuses personnalités du secteur.
« Ce projet correspond à toutes les grands défis actuels de l’aviation » a récemment confié à la presse l’entrepreneur Mikhail Kokorich. « La préservation de l’environnement, avec zéro émission de CO2 en vol, la vitesse et l’autonomie, le drone étant 100% autonome. »
L’hydrogène pour un vol sans émission de CO2
C’est appareil fonctionnera en effet avec de l’hydrogène. Le moteur à hydrogène a ses partisans car il n'émet aucun CO2. C’est le gros avantage de cette technologie. Pour ses détracteurs, encore faut-il que l'hydrogène utilisé soit « propre », c'est-à-dire produit à partir d’énergies renouvelables telles que l'énergie solaire, l'énergie éolienne, l'hydroélectricité… Et même vert, l’hydrogène produira malgré tout des oxydes d’azote polluants (NOx) et de la vapeur d’eau, contribuant ainsi à la formation de traînées de condensation et de cirrus, néfastes pour le climat.
« A ce jour, la production d’hydrogène reste polluante même si le carburant en lui-même est neutre en CO2. Notre objectif est de développer un mode de transport propre. A travers nos recherches et développements, nous voulons prendre part au développement de la filière de production », explique Bart Van Hove, Responsable des études avancées chez Destinus.
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Comment fonctionnera Destinus ?
Concrètement, après un décollage avec un moteur d’avion à hydrogène liquide, l’appareil enclenchera ses turboréacteurs avec postcombution et un statoréacteur, tous deux alimentés par de l’hydrogène. Il augmentera alors sa vitesse pour atteindre une moyenne de 6 000km/h et ainsi réduire drastiquement les temps de vol. Singapour ne sera plus qu’à 3h30 de Paris ou Genève, contre 13h aujourd’hui.
Il décollera depuis des aéroports commerciaux classiques équipés d'infrastructures de manutention de l'hydrogène.
Destinus doit encore surmonter de nombreux défis pour aboutir :
• Des défis technologiques : il doit par exemple développer un fuselage capable de résister à de très hautes températures à cause de la friction de l’air à haute vitesse. Pour répondre à la problématique, la société développe un système de refroidissement avec de l’hydrogène liquide.
Il doit aussi trouver le moyen de réduire le bruit émis en raison de la vitesse hypersonique. « L’objectif est que l’appareil ne fasse en tout cas pas plus de bruit que les avions de ligne actuels. Le bang sonique sera présent, mais nous survolerons l'océan et des terres non peuplées pour cette partie», précise Bart Van Hove.
• Des défis logistiques : aujourd’hui, la chaîne de production/transport/stockage de l’hydrogène n’est pas prête. Destinus participe, en développant son projet, à la mise en place de cet écosystème.
• Un défi sociétal : il faudra convaincre le grand public que son appareil sans pilote est 100% sécurisé.
S’il reste un certain nombre de challenges à Destinus pour voir le jour, le projet est suffisamment crédible pour que des investisseurs sérieux s’y intéressent. En avril 2023, le gouvernement espagnol lui a accordé des subventions d'une valeur de 26,7 millions d'euros dans le cadre de la politique de développement des vols supersoniques à hydrogène. « Ce financement démontre clairement que Destinus s'aligne sur les objectifs stratégiques de l'Espagne et de l'Europe pour faire progresser les vols à l'hydrogène », s’est réjoui lors d’une conférence de presse Davide Bonetti, vice-président chargé du développement commercial et des produits chez Destinus.
